Pas d'hébergement d'enfants réfugié·es et de leurs familles dans des abris antiaériens !

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Campax Bild zur Petition: Eingang eines Bunkers

En ce 6 mars 2024, la pétition "Pas d'hébergement d'enfants réfugié·es et de leurs familles dans des abris antiaériens !" a été déposée avec au total 8'721 signatures à la chancellerie fédérale. Nous avons été invité·es à nous exprimer lors de la remise. L’occasion pour nous de rappeler que de telles initiatives de la société civile sont cruciales en cette période d’attaques incessantes contre les droits des personnes migrantes.

 

"Nous sommes ici dans l’enceinte du Palais fédéral, siège du Parlement et du Gouvernement de l’un des pays les plus riches du monde. Et ce que nous demandons, c’est que des familles et des enfants - mais aussi tout être humain - ne soient pas logé·es dans des conditions de survie ou de catastrophe humanitaire. Car c’est à ça que sont destinés les abris souterrains d’urgence : à la survie. Ce sont des abris qui ont été construits pour se défendre face à des attaques nucléaires, à des situations de guerre.

 

Nous ne sommes pas en guerre. Ce qui est attaqué, c’est la dignité, c’est l’accès aux droits des personnes que l’on force à vivre dans ces abris souterrains. Si le système d’asile est dans une situation d’urgence, c’est comme l’affirmait la WOZ de la semaine passée, une situation d’urgence produite par une volonté politique

 

Comment est-ce que nous en sommes arrivé·es là ? Les personnes déboutées du régime d’asile sont victimisées par un racisme bien spécifique. Il est issu d’un processus long et complet d’altérisation, le fait de rendre « autre », un groupe de personne en raison de son origine extra-européenne et de son statut administratif. Un article digne de lecture signé Jana Häberlein et Claudia Wilopo met sur un même continuum de violence les différents aspects des politiques migratoires suisse et européenne ; L’aide d’urgence, l’illégalisation de l’entrée en Suisse, les violences policières, le laisser-mourir en Méditerranée et la compromission de la Suisse dans les violences aux frontières extérieures de l’Europe, participent de ce phénomène de relégation d’un groupe de personnes à la marge. À la marge de la société, à la marge de l’économie, à la marge des droits. Pour quel autre groupe de personnes en Suisse tolérerait-on le fait de permettre d’à peine survivre avec 25% du minimum de l’aide sociale ?

 

Et quel effet est-ce que cela a sur nous en tant que société ? Quel effet cela a sur les personnes qui lisent dans les journaux ou dans les feuilles d’information de leur commune qu’un nouvel abri souterrain sera ouvert pour y loger « des migrant·es » ? 

 

Cela fait que l’on risque de s’y habituer. Cela rend acceptable qu’en Suisse - encore une fois, l’un des pays les plus riches du globe- certaines personnes puisse vivre dans un abri minable, avec moins de 10 CHF par jour et des soins de santé minimaux. Dans certains cantons, les enfants dont les parents ont le statut de débouté·es ne sont qu’à peine, voire même pas scolarisés. 

 

L’on pourrait penser que ce régime d’exception est le fruit de politiques de droite. Mais rappelons qu’il y a une semaine à peine, le ministre socialiste de Justice et Police, celui d’ailleurs à qui s’adresse cette pétition, annonçait fièrement qu’il voulait introduire une procédure d’asile express pour les jeunes hommes originaires d’Afrique du Nord. Le régime d’exception, la violation de l’universalité du droit d’asile devient un discours porté par un ministre de gauche. 

 

Face à des politiques hors sol, décidées par des technocrates guidés par une ignorance voulue des réalités du terrain, cette pétition révèle toute son importance. Elle montre que dans la société civile il y a des voix qui s’élèvent pour montrer que l’inacceptable ne saurait être accepté. Cette pétition dit : « Stop, ouvrez les yeux ; et fermez les abris souterrains ». 

 

Nous ne sommes pas en guerre, et nous refusons d’être en guerre contre la migration. Nous voulons vivre dans une société où tout le monde peut prendre sa place. Dans une société où le bien de chacun·e est la condition nécessaire au bien de tou·xtes. Solidarité sans frontières exprime son plein soutien aux pétitionnaires, et à toutes les personnes condamnées à vivre dans l’indignité, qui n’a de supérieure que celle des politiques qui la produisent."